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Le nouveau directeur général de l'OMC devra faire face à des défis importants

13 mai 2013

Comme prévu, l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) vient de désigner son nouveau directeur général (DG). Il est brésilien et se nomme Roberto Azevedo. Il succède au français Pascal Lamy et prendra ses fonctions à Genève le 1er Septembre prochain. L'élection de Monsieur Azevedo souligne la puissance accrue des pays du Sud. Son rôle sera de relancer des négociations commerciales actuellement dans l'impasse depuis 2001, et de réformer le système commercial multilatéral.

Le nouveau Directeur Genéral de l'Organisation Mondiale du Commerce, le brésilien Roberto Azevedo

 

L'élection de Roberto Azevedo à la tête de l'OMC est lourde de sens

L'OMC est une organisation regroupant 156 Etats-membres qui élisent leur DG après plusieurs tours d'élections. Roberto Azevedo était soutenu par les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du SUD) et par les pays émergents. Il était notamment en concurrence avec un Mexicain qui était lui soutenu par les pays riches, Etats-Unis, Japon et Union Européenne en tête. Le fait que ce soit le candidat brésilien qui ait remporté souligne le poids accru des pays du Sud dans la population mondiale, la richesse mondiale et le commerce international. Les pays en développement n'ont plus besoin des pays du Nord pour accéder à la direction d'instances internationales. De plus, on constate que ces pays commercent de plus en plus entre eux, ce qui diminue leur dépendance vis-à-vis des pays riches.

La situation au sein de l'OMC fait apparaître un état des lieux contrasté

L'OMC est une organisation multilatérale à la fois jeune, mais également ancienne. L'organisation est jeune car sa forme contemporaine date de 1995 et n'a connu que des DG occidentaux, mis à part une courte parenthèse avec un thaïlandais à sa tête. Toutefois, elle conserve un aspect ancien car elle est l'héritière du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) créé en 1947 et qui fonctionne donc sur des règles issues de l'après-guerre.

Le rôle est de promouvoir et de libéraliser le commercial international au travers notamment la diminution des barrières douanières. Pour ce faire, l'OMC fonctionne sur le triptyque suivant :

1) Un ensemble de règles et de principes : le but est de stabiliser et de sécuriser le commerce international. Autrement dit, cela permet de clarifier l'information afin que le commerce international soit prédictible, c'est-à-dire qu'il y ait de la stabilité et de la visibilité dans le temps. Sur ce point, l'OMC a parfaitement réussi sa mission car il concerne maintenant 95% des biens et services, à 'exception de quelques produits tels que le pétrole et le gaz.

2) Une instance d'arbitrage : l'OMC règle des conflits commerciaux entre différents pays. Elle a donc un pouvoir de sanction. A ce titre, le nouveau DG, M. Azevedo, a déjà fait ses preuves car il a déjà fait condamner les Etats-Unis et l'Union Européenne sur des dossiers liés au coton et au sucre. Là aussi, le bilan de l'OMC est relativement positif même si la complexité et la lourdeur des procédures font que les règlements prennent beaucoup de temps.

3) Un forum de négociation : c'est le "cœur de métier" de l'OMC, mais c'est aussi sa principale faiblesse. En effet, les négociations sont maintenant bloquées depuis 2001. Le blocage négociations tient notamment au fait que les états restent souverains au sein de cette instance, et de ce fait, il n'est pas possible de leur imposer des décisions. De plus, les sujets mis sur la table sont sources de conflits.

Le nouveau directeur général devra relancer les négociations

Le blocage des négociations commerciales multilatérales (entre plusieurs parties) fait courir des risques majeurs à l'économie mondiale, à fortiori dans la période de crise globale actuelle :

  • le développement du commerce international est un facteur très important de la croissance mondiale. Une diminution du commerce entraîne une baisse des échanges et des investissements, et donc une hausse du chômage. Dans ce contexte, retrouver une dynamique commerciale au sein de cette instance apparaît comme une partie de la solution à la crise globale actuelle.
  • constatant le blocage des négociations multilatérales, les accords bilatéraux (entre deux parties) se développent. La multiplication de ces accords (deux par semaine en moyenne) de ces accords fait courir deux risques. Tout d'abord, ils créent des règles conflictuelles et contradictoires entre elles qui aboutissent in fine à freiner le commerce international global, et donc la croissance mondiale (30% du commerce mondial est maintenant régi par environ 250 accords bilatéraux). De plus, le recul du multilatéralisme va de pair avec la montée du protectionnisme et des nationalismes. En effet, l'histoire le montre (ex: l'entre deux-guerres), le commerce est le meilleur moyen, avec la monnaie, d'assurer la paix. Deux pays qui commercent ensemble ou qui ont une monnaie commune n'ont plus d'intérêt à se faire la guerre. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard si les deux pays qui commercent le plus en pourcentage de leur PIB sont l'Allemagne et la Japon.

Le directeur général de l'OMC n'a pas un pouvoir suffisant pour relancer à lui seul les négociations. Néanmoins, l'élection d'un diplomate chevronné, qui plus est provenant d'un pays du Sud, habitué aux négociations internationales et connaisseur des arcanes de l'OMC, pour avoir été depuis 2008 le représentant permanant du Brésil en son sein, peut créer l'étincelle nécessaire. Plus prosaïquement, son pouvoir sera d'orienter les débats pour les recadrer vers des sujets plus consensuels. Il pourra également utiliser l'administration de l'OMC pour les pays-membres à accoucher d'un accord et surtout à défendre et à promouvoir l'action de l'OMC et à rappeler l'intérêt et l'importance d'un accord. Pour ce faire, il pourrait tout d'abord décider de diminuer le nombre des sujets des négociations en cours et, par la suite, en ajouter d'autres. L'idée générale serait qu'il arrive à faire naître un accord, même minime, mais qui close le débat pour ensuite aller de l'avant.

Roberto Azevedo devra lancer une réforme du système commercial multilatéral

Le blocage des négociations depuis 2001 souligne avec une certaine acuité la nécessité de faire évoluer ce dernier. Il y a trois aspects qui doivent être prioritairement changés :

1) L'engagement unique : c'est-à-dire le fait qu'une négociation n'est finie et une autre ne peut s'ouvrir que quand l'ensemble des aspects de la négociation sont entérinés. Autrement dit, les sujets décidés s'imposent à l'ensemble des parties et il n'y a pas de demi-mesure possible en l'état.

2) Les catégories de pays : Il y a actuellement seulement trois catégories de pays : les pays développés, les pays les moins avancés (PMA), et les pays en développement (PED). Il apparaît que ce concept est dépassé et qu'il existe notamment de grandes différences au sein des PED. Typiquement, la Chine a fait son entrée au sein de l'OMC en 2001 est considérée comme un PED, et à ce titre elle bénéficie de facilités et de souplesses.

3) Le contenu des négociations : concernant les produits manufacturiers, il faudrait prendre en compte le nouveau statut des PED et leur importance accrue dans le commerce international. Concernant les produits agricoles (principal point de blocage actuel) il est important de rendre les négociations légitimes. Pour cela, il faut que le but des négociations soit la sécurisation alimentaire via les mécanismes de marché et pas la mise en place de distorsion de concurrence qui amènent des surcapacités via des subventions et la protection de secteurs nationaux. Le but est de pouvoir faire diminuer les tarifs alimentaires pour permettre un meilleur accès aux produits des PED aux marchés des pays riches.

Citation

Sylvain Fontan, “Le nouveau directeur général de l'OMC devra faire face à des défis importants”, décryptage publié sur «www.leconomiste.eu» le 13/05/2013.

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