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Nouvelle étape dans la construction européenne : l'Union Bancaire

26 juin 2013

La crise financière de 2008-2009 a souligné des lacunes dans la construction européenne. En effet, plusieurs pays ont développé des systèmes de soutien à l'activité économique afin de limiter les conséquences de la crise. Pour ce faire, ils ont dû faire appel aux contribuables pour sauver des institutions financières sans lesquelles l'ensemble du système courait le risque de s'effondrer. L'idée d'une Union Bancaire est alors apparue comme une réponse possible à ces lacunes pour éviter que cela puisse se reproduire à l'avenir. Le but de cette union, dont les contours sont en cours de négociations, serait de couper les liens entre la dette des banques et celle des Etats, ainsi que de mettre en place un fonds de secours pour venir en aide à ces mêmes banques. L'union bancaire serait composée de trois piliers : un Mécanisme de Supervision Unique (MSU), un mécanisme de résolution des crises, et enfin un "filet" de sécurité pouvant garantir les dépôts. Malgré des objectifs louables, la mise en pratique de cette union ne fait pas l'unanimité et plusieurs limites apparaissent.

Les trois piliers du projet d'Union Bancaire dans les pays de la Zone Euro

 

La structure de l'Union Bancaire

L'Union Bancaire doit pouvoir assurer la solidité de l'architecture financière entourant la monnaie unique, au travers de pouvoirs de contrôle et des ressources de sauvetage organisées autour de trois piliers. :

1) Le Mécanisme de Supervision Unique (MSU) consiste à désigner une instance supranationale censée encadrer les obligations de l'ensemble des banques européennes de la zone euro en matière d'action financière, structure des bilans, etc. L'entité à qui devrait revenir ce rôle est la BCE (Banque Centrale Européenne).

2) Le mécanisme de résolution consiste en la définition de procédures et la mise en place de fonds, capables de démanteler de façon organisée et coordonnée des banques en cas de faillite. Autrement dit, ce deuxième pilier prévoit l'organisation de la faillite des établissements bancaires et la définition du partage des pertes entre les différentes parties prenantes (Etats, BCE, actionnaires).

3) La garantie des dépôts vise à institutionnaliser la garantie de l'ensemble des dépôts bancaires inférieurs à 100'000 euros. Le but recherché est d'éviter un mouvement de panique qui se traduirait par un retrait massif et rapide de l'épargne qui entrainerait mécaniquement un effondrement du système bancaire, et par voie de conséquence du système économique dans son ensemble.

Malgré des avancées, l'Union Bancaire n'est pas encore une réalité. Plusieurs réunions sont prévues à ce sujet jusqu'à la fin de l'année 2013 pour qu'une mise en place puisse être possible au début 2014. L'état d'avancement des trois différents points est inégal. En effet, la mise en place d'une supervision unique a bien progressé, le mécanisme de résolution présente un certain nombre de points d'achoppement entre les pays, enfin, les discussions sur la garantie des dépôts sont à l'arrêt.

Enjeux concernant les modalités de résolution des crises

Au niveau de la sphère publique, il convient de savoir si la résolution reste essentiellement circonscrite au niveau national, ou si des fonds européens peuvent injecter du capital directement dans les banques. La question n'est pas anodine car elle implique un éventuel changement profond de philosophie du fonctionnement de la Zone Euro. Certains pays veulent limiter strictement l'utilisation des fonds européens pour le sauvetage des banques (MES - Mécanisme Européen de Stabilité) et qu'ils ne puissent pas intervenir directement. Egalement, plusieurs pays, dont l'Allemagne, veulent limiter la régulation au niveau supranational et conserver essentiellement une régulation nationale.

D'un point de vue technique, les craintes liées à l'utilisation du MES sont dues à la nature même du mécanisme. En effet, plus le mécanisme va investir dans les banques, plus sa note (qui permet d'emprunter à des taux faibles sur les marchés) va se dégrader et entraîner un endettement plus élevé. La crainte est donc de rentrer dans un cercle vicieux. Au niveau national, l'enjeu c'est que chaque pays préfère régler ses problèmes seul sans avoir à rendre des comptes à l'extérieur. Une telle résolution pourrait également entraîner des coûts car la BCE devrait établir une évaluation du système bancaire qui se traduirait, entre autre, par la publication des bilans bancaires (passifs et actifs) de chaque banque, et le cas échéant, les Etats ou les actionnaires devraient apporter des liquidités pour aider les banques dans le besoin.

En effet, en cas de crise bancaire, il convient de définir le niveau d'intervention du secteur privé qui doit "prendre ses pertes" si la fermeture ou la restructuration d'une banque est nécessaire. En pratique, cela implique de définir un ordre dans les entités devant supporter le coût d'une crise bancaire. A ce niveau, il semble que l'ordre logique soit de mettre à contribution tout d'abord les actionnaires, puis les détenteurs d'obligations, puis les contribuables par l'intermédiaires des Etats, et enfin les dépôts bancaires supérieurs à 100'000 euros. Le but étant de mieux circonscrire les risques supportés par les contribuables.

Enjeux concernant la surveillance et l'organisation du système bancaire européen

Il s'agit avant tout de créer les conditions du soutien au crédit et à l'activité économique des Etats de la Zone Euro. Autrement dit, partir sur des bases saines qui n'avaient pas forcément été mises en place lors de l'introduction de la monnaie unique. En effet, les banques sont nécessaires car elles permettent le financement quotidien des entreprises et participent aux conditions de leur développement futur. En cas d'assèchement du crédit, les entreprises ne peuvent plus investir, ce qui signifie de facto leur disparition, ainsi que les emplois qui leurs sont liés. Le constat est spécialement vrai en Europe où près de 80% du financement des entreprises provient du crédit bancaire et seulement 20% provient d'un financement sur les marchés via les actions ou les obligations. La situation est totalement inverse aux Etats-Unis où les entreprises font avant tout appel aux marchés financiers pour se financer.

Dans ces conditions, la "santé" des banques européennes apparaît indispensable pour pouvoir leur permettre d'assurer leur rôle de financement de l'économie. Or, pour prêter, les banques doivent bénéficier de bilans sains. A l'occasion de la crise financière, il est apparu que les bilans bancaires présentaient une certaine quantité de dettes de mauvaise qualité. Dans ce cadre, les banques ont dû en partie se désendetter. Jusqu'à maintenant, ce désendettement est essentiellement effectué avec la vente d'actifs étrangers, pour ne garder majoritairement que des prêts nationaux. Le problème, c'est qu'avec la dégradation de l'économie européenne, les prêts nationaux non performants (prêts qui n'ont pas pu être remboursés) ont augmenté, dégradant ainsi de nouveau les bilans des banques.

Limites et effets pervers de l'Union Bancaire

L'Euro a été mis en place avant toute réflexion sur le système bancaire dans ce cadre, dès lors, les pays membres de la Zone Euro doivent réfléchir à un système permettant de coordonner les actions et définir un cadre commun sur lequel il est possible de se baser.

Néanmoins, instinctivement, plusieurs éléments apparaissent comme ambigus concernant l'objectif initial de cette union bancaire :

  • Tout d'abord, l'idée d'une union bancaire part de deux postulats. D'une part, les crises bancaires et financières actuelles seraient liées à la monnaie unique. Or, il apparaît qu'il y a déjà eu des épisodes de crise bancaire et financière dans l'histoire antérieure à la mise en place de l'Euro. D'autre part, et à supposer que les crises actuelles soient bien le fait de l'Euro, l'union bancaire fait le postulat qu'un superviseur unique et supranational sera plus compétent que des superviseurs nationaux. Or, cette idée est une hypothèse forte, c'est-à-dire "peu prouvée".
  • L'union bancaire postule également que les mécanismes de régulations sont plus aptes que les mécanismes naturels de marché à régler les crises. Là aussi, l'hypothèse est forte.
  • En cas de sauvetage organisé des banques de la zone euro, les banques hors zone euro pourraient à juste titre dénoncer une distorsion de concurrence. En effet, ce mécanisme permet un acquis de confiance dans les banques de la zone euro, et crée de facto un déficit de confiance dans les autres. Dès lors, à vouloir régler un problème, il est possible, qu'en réalité l'Europe crée les conditions d'émergence de risques hors de la zone euro via un mécanisme de déplacement de la défiance.
  • Le principe du sauvetage et d'aide directe peut créer un effet d'aléa moral. Autrement dit, une banque ou un Etat pourrait laisser dériver son bilan ou son système bancaire sans avoir à en assumer le coût. En effet, les pays voisins du pays en question devront payer pour un système bancaire étranger.
  • Enfin, le MES ne pourrait pas être utilisé dans son ensemble pour recapitaliser des banques. "Seuls" 60 milliards d'euros pourraient l'être. Le montant est conséquent mais totalement inefficace en cas de crise majeure sur un marché tel que la France où les besoins se chiffreraient en plusieurs centaines de milliards d'euros.

Citation

Sylvain Fontan, “Nouvelle étape dans la construction européenne : l'Union Bancaire”, décryptage publié sur «www.leconomiste.eu» le 26/06/2013.