"Il y a deux manières de conquérir et d'asservir une nation, l'une est par les armes, l'autre par la dette." - John ADAMS
"La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. L’homme est une création du désir, et pas une création du besoin" - Gaston BACHELARD
"En général, on parvient aux affaires par ce qu'on a de médiocre, et on y reste par ce que l'on a de supérieur" - François-René de CHATEAUBRIAND
"Nous sommes des créatures qui nous affligeons des conséquences dont nous continuons à adorer les causes " - BOSSUET
"Quand vous êtes capable, feignez l'incapacité. Quand vous êtes proche, feignez l'éloignement. Quand vous êtes loin feignez la proximité" - Sun TZU
"Tous les hommes politiques appliquent sans le savoir les recommandations d’économistes souvent morts depuis longtemps et dont ils ignorent le nom " - John Maynard KEYNES
"L’avenir ne se prévoit pas, il se prépare " - Maurice BLONDEL
"La seule cause de la dépression est la prospérité" - Clément JUGLAR
"L'offre créée sa propre demande" - Jean-Baptiste SAY
"La liberté n’est pas l’absence d’engagement, mais la capacité de choisir" - Paulo CUELHO
18 mars 2013
Après avoir augmenté les impôts et taxes, la France cherche à faire des économies, et envisage notamment de diminuer les allocations familiales à hauteur de 2 milliards d'euros. Sans revenir sur l'articulation entre hausse d'impôts et baisse de dépenses, ainsi que sur le timing choisi et la cible, il convient de s'interroger sur le but recherché et sur l'opportunité de diminuer les allocations familiales. Dès lors, il apparaît que ce projet s'avère risqué et inadapté pour faire face à la problématique de désendettement à laquelle est confrontée la France.
Diminuer les allocations familiales constitue un risque à court, moyen et long terme:
Un des points fort de l'économie française (et peut être même son principal) est le dynamisme de sa démographie. En effet, la France est un des rares pays industrialisé développé qui bénéficie d'une population qui augmente. Ce dynamisme démographique s'explique notamment par un taux de natalité supérieur à la moyenne des pays comparables et qui permet ainsi le renouvellement de la population. Si la France présente un tel dynamise démographique c'est, entre autre, grâce à sa politique familiale héritée de l'après-guerre. Cette politique est principalement basée sur le système des allocations familiales qui incitent les familles à avoir des enfants. Le système familial français est internationalement reconnu comme un système qui fonctionne. Plusieurs pays essayent d'ailleurs de s'en inspirer pour faire face au déclin de leur démographie (ex: Allemagne).
Revenir sur ce système qui a fait ses preuves poserait les problèmes suivants:
1) A court terme, cela reviendrait à une augmentation de l'imposition des ménages. En effet, une baisse des aides (que ce soit au travers d'un plafonnement ou par une fiscalisation des aides) reviendrait à augmenter la fiscalité globale qui pèse sur les ménages. Dès lors, tout comme la taxe sur les cigarettes fait diminuer la consommation de cigarettes, la taxe sur les familles ferait diminuer l'incitation à fonder ou agrandir une famille.
2) A moyen terme, le projet de diminution des allocations familiales entrainerait une brèche dans le système français d'assurance sociale. En effet, décréter une baisse des prestations sociales, sans mettre en place en contrepartie une diminution des cotisations, irait à l'encontre même du principe d'assurance où les sommes payées sont calculées en fonction des prestations reçues. En d'autres termes, les personnes concernées par ce projet payeraient toujours plus mais recevraient moins, diminuant là aussi l'incitation à fonder une famille.
3) Enfin, à long terme la France devrait faire face à une diminution de sa croissance économique potentielle et à une aggravation du problème du financement des retraites. En effet, la combinaison des deux précédents effets aurait comme impact de diminuer le dynamisme démographique français. Or, la croissance démographique d'un pays impacte directement la croissance économique potentielle. Ainsi, remettre en cause un pilier de la politique familiale limiterait la croissance économique à long terme avec tous les effets négatifs que cela peut avoir. Enfin, la diminution du dynamisme démographique diminuera le nombre d'actifs sur le marché du travail. Dès lors, comme ce sont les actifs qui financent les retraites et que le nombre de retraités est appelé à augmenter, la problématique du financement des retraites sera rendue encore plus compliquée à résoudre.
La somme de 2 milliards d'euros est insuffisante face au niveau des déficits:
Le projet prévoit pour le moment de diminuer par deux les prestations dont bénéficient actuellement les ménages avec deux enfants et avec un salaire de 2200 euros par mois et par personne. La nature de la diminution n'est pas encore renseignée mais les ordres de grandeurs et les sommes ponctionnées ne sont à priori pas appelées à devoir évoluer. Ainsi, le gouvernement au travers de ce projet cherche à économiser 2 milliards d'euros à court terme.
L'objectif de la baisse de ces prestations est de trouver une réponse au déficit de la sécurité sociale française. Les trois grandes branches de la sécurité sociale sont les branches Famille, Santé et Vieillesse. Le déficit cumulé de l'ensemble des branches s'élève à près de 15 milliards d'euros. Il apparaît donc que si le gouvernement réussi à réaliser 2 milliards d'économies sur les allocations familiales, il restera cependant un déficit de 13 milliards. Dès lors, si cette diminution des prestations est choisie, elle ne pourra être au mieux qu'une partie de la solution. Ainsi, cette réponse n'est pas adaptée à la hauteur du problème.
Conclusion:
Le projet de diminution des allocations familiales traduit un problème de vision à long terme et de défense de l'intérêt général. En effet, en plus d'être inadapté, ce projet est une solution de facilité de court-terme. L'avantage de ce projet est de permettre des effets très rapides sur les comptes publics sans impliquer un débat politique long est compliqué. Toutefois, d'une part, les sommes en jeu sont infimes par rapport au fardeau de la dette auquel la France doit faire face; et d'autre part, le projet ne résout pas le déficit de la sécurité sociale qui ne pourra être résorbé qu'avec une vision globale de long-terme impliquant des solutions de structure difficiles à la fois techniquement et politiquement.
Citation
Sylvain Fontan, “La baisses des allocations familiales est-elle opportune?”, décryptage publié sur «www.leconomiste.eu» le 18/03/2013.